Select Page

Une grossesse en santé dans un environnement sain – deuxième partie

Par Mélanie Demers, inf. B.Sc.

Pour vivre une grossesse en santé dans un environnement sain, changer quelques gestes quotidiens peut faire toute la différence. Voici d’autres éléments à considérer afin de sécuriser l’environnement de la femme enceinte et, par la suite, celui de bébé.

Évitez les produits antibactériens

L’utilisation de plus en plus répandue des produits antibactériens contribue certainement à l’augmentation des bactéries résistantes aux antibiotiques ou superbactéries. De plus, vivre dans un endroit aseptique peut aussi contribuer à affaiblir le système immunitaire, car il rencontre très peu de « microbes » contribuant à le renforcer. Le triclosan, un antibactérien présent dans de nombreux produits, du rince-bouche au savon à main, en passant par les chaussettes, a été retrouvé dans l’urine de 75% des Américains et dans celle de nombreux Canadiens. Le triclosan est reconnu comme étant un perturbateur endocrinien car il inhibe l’action des oestrogènes nécessaires à une grossesse en santé. Des études l’ont aussi associé à des dommages au système nerveux du fœtus, à un faible poids à la naissance et à un dysfonctionnement de la thyroïde. Donc, fuyez tout ce qui porte la mention « antibactérien » ou « combat les odeurs », car ils risquent fort de contenir du triclosan. Soyez rassurés : un lavage des mains régulier et bien fait s’avère tout aussi efficace pour enlever les germes que les savons antibactériens.

Éliminez les pesticides

Les pesticides sont des substances chimiques toxiques destinées à tuer des êtres vivants : insectes, mauvaises herbes, champignons. Alors, inutile de dire qu’ils sont aussi capables de causer des dommages in utero. L’exposition prénatale aux pesticides peut affecter la croissance crânienne et la circonférence de la tête, altérer le développement neurologique, causer des anomalies uro-génitales, de même que des malformations circulatoires, respiratoires et musculosquelettiques. Donc, pendant la grossesse, évitez les pesticides de toutes sortes, incluant ceux utilisés pour la pelouse. Dans le cas d’une infestation à l’intérieur de la maison, utilisez la méthode la moins toxique pour l’éradiquer et n’oubliez pas que la prévention demeure l’option à privilégier, entre autre, en gardant la cuisine propre.

Évitez la manipulation du papier thermique

Le papier thermique est utilisé pour les reçus de caisse, de carte de crédit et autres de même que dans certains télécopieurs et autres appareils du même type. On peut le reconnaître facilement : l’encre utilisé sur ce type de papier disparaît avec le temps. En outre, il contient souvent un perturbateur endocrinien appelé bisphénol A (BPA) qui est facilement absorbé par la peau. Selon les études, l’exposition prénatale au BPA peut perturber le développement, affecter la croissance, causer des problèmes comportementaux et émotifs chez les jeunes enfants et provoquer l’asthme et le cancer du sein plus tard dans la vie. De plus, il a été associé à un risque plus élevé d’avortement spontané. Étant donné son omniprésence, il est pratiquement impossible de l’éviter complètement, mais l’exposition peut être minimisée.

  • Si vous n’avez pas besoin du reçu, ne le prenez pas.
  • N’entreposez pas vos reçus dans votre sac à main, placez-les plutôt dans une enveloppe.
  • Lavez vos mains après avoir manipulé des reçus ou de l’argent, particulièrement avant de manger.
  • Évitez d’utiliser un désinfectant pour les mains après avoir manipulé des reçus, car il augmente l’absorption du BPA.

Enlevez vos tapis, si possible

Les tapis, qu’ils soient en mousse ou non, sont habituellement traités avec des produits ignifuges. En fait, près de 90% d’entre eux contiennent un ou plusieurs produits ignifuges considérés toxiques. Parmi ceux-ci, les polybromodiphényléthers (PBDE) sont suspectés d’altérer les hormones thyroïdiennes chez la femme enceinte, ce qui peut amener des plus petits fœtus ainsi qu’une diminution de l’intelligence et des habiletés motrices. Ils ont aussi été associés à des retards neurodéveloppementaux. Les tapis ont souvent tendance à se désagréger et la poussière qu’ils créent se trouve chargée de produits ignifuges. Évidemment, le retrait des tapis n’est pas une tâche pour une femme enceinte et demande certaines précautions afin d’éviter la dispersion excessive des poussières. Surtout, n’oubliez pas de bien nettoyer l’espace lorsque le travail est terminé. Pour les pièces dont le revêtement de plancher est le tapis, investissez dans un bon aspirateur, idéalement avec un filtre HEPA qui empêche la poussière de revenir dans l’air ambiant, et passez-le régulièrement.

Références :

Healthy Child Healthy World (2014). Easy Steps to a Safer Pregnancy: A guide to protecting your growing baby from toxic chemicals, California, 53 pages. Disponible au http://healthychild.org/its-an-e-book-welcome-to-our-new-healthy-pregnancy-e-book/ [En ligne].

Santé Canada (2013). Deuxième rapport sur la biosurveillance humaine des substances chimiques de l’environnement au Canada : Résultats de l’Enquête canadienne sur les mesures de santé Cycle 2 (2009 à 2011), Ottawa, 456 pages. Disponible au www.santecanada.gc.ca/biosurveillance

Les apprêts ignifuges sont-ils absolument nécessaires?

Par Mélanie Demers, inf. B.Sc.

Les apprêts ignifuges (ignifugeants) sont présents dans plusieurs produits courants dans nos maisons, mais aussi dans les accessoires pour bébé. Doit-on s’en méfier?

Qu’est-ce qu’un ignifugeant?

Un apprêt ignifuge ou ignifugeant est un produit chimique ajouté à plusieurs produits à la maison, au bureau et un peu partout dans notre environnement. Il en existe plusieurs dont les PBDEs (je vous évite le nom complet) et les Tris (il y en a plusieurs sortes) qui sont très utilisés et dont les effets s’avèrent particulièrement préoccupants pour la santé et ce, surtout pour les enfants, particulièrement exposés. Ces produits sont utilisés pour satisfaire les normes sur l’inflammabilité.

Quels sont leurs effets possibles sur la santé?

Les PBDEs

Les PBDEs s’accumulent dans notre corps et sont persistants dans l’environnement, c’est-à-dire qu’ils ne se dégradent pas facilement. L’exposition aux PBDEs est liée à des déséquilibres hormonaux, à des problèmes de thyroïde et à des dommages liés au système reproducteur comme des testicules non descendus, une puberté retardée, une diminution de la fertilité, des naissances de bébés à petits poids et des malformations à la naissance. Ils ont été détectés dans le lait maternel ce qui s’avère très préoccupant pour le développement des enfants, des bébés et des fœtus qui y sont plus exposés. Les apprêts ignifuges sont utilisés pour prévenir les feux couvrants (par exemple, causés par une cigarette allumée) et empêcher les produits de brûler intensément lorsqu’ils sont exposés à une flamme nue.

Les Tris

Les Tris les plus préoccupants sont le TDCPP, le TCEP et le TCPP (je vous épargne les noms complets).

Le TDCPP a été déclaré carcinogène par l’état de la Californie en 2011. De plus, il peut causer des mutations qui peuvent mener au cancer et à d’autres problèmes. Il cause aussi des dommages au système nerveux et des déséquilibres hormonaux. En effet, une étude publiée en 2010 a trouvé que les hommes qui y étaient les plus exposés avaient des taux d’hormones thyroïdiennes plus faibles et des taux de prolactine  plus élevés.

Le TCEP a aussi été déclaré carcinogène par l’état de la Californie. Il peut causer le cancer, des dommages au système nerveux et s’avère toxique pour la reproduction.

Quant au TCPP, très peu d’informations sont disponibles sur sa toxicité. Cependant, la similarité dans sa structure à un autre Tris laisse suspecter que sa toxicité puisse y être similaire.

Où les retrouve-t-on?

Les PBDEs

Les PBDEs sont des agents chimiques de synthèse ajoutés à certains tissus et plastiques durant leur processus de fabrication. Ils agissent aussi à titre d’ignifugeants. Il en existe plusieurs sortes. Ils sont ajoutés à la mousse de polyuréthane utilisée pour le recouvrement des meubles, dans les produits rembourrés pour bébé, dans les ordinateurs, les télévisions et autres appareils électroniques, dans le recouvrement des fils de ces appareils et dans les automobiles. Ils sont aussi utilisés dans le traitement des tissus de recouvrement des tapis et des rideaux. Étant donné qu’il s’agit d’additifs, c’est-à-dire qu’ils ne sont pas chimiquement liés au matériaux dans lesquels ils sont utilisés, ils peuvent s’en échapper et se retrouver dans la poussière de nos maisons et dans l’air intérieur. Une fois qu’ils s’y trouvent, ils sont susceptibles de pénétrer dans notre corps par la respiration ou par l’ingestion accidentelle de poussière (d’où la vulnérabilité des jeunes enfants). De plus, leur utilisation massive fait qu’on les retrouve de plus en plus dans la nourriture, plus particulièrement dans les huiles et gras du poisson et des fruits de mer, la viande et les produits de la viande, de même que les œufs.

Les Tris

Les Tris sont utilisés pour traiter la mousse de polyuréthane rigide et flexible afin de la rendre résistante à la flamme. Ils entrent aussi dans  la fabrication de certains plastiques et dans d’autres procédés industriels. Certains ont été retrouvés dans l’air intérieur des maisons, des bureaux, des bibliothèques, des hôpitaux, des salles d’ordinateurs, des autos et des magasins de meubles.

Les apprêts ignifuges dans les produits pour enfants

Les compagnies n’ont pas à déclarer les ignifugeants qu’ils utilisent dans leurs produits tant qu’ils rencontrent les normes d’inflammabilité. Une étude réalisée conjointement par la Washington Toxics Coalition et Safer States en 2012, a évalué la présence de produits ignifuges dans 101 produits pour bébé et a découvert la présence d’ignifugeants toxiques dans 85% d’entre eux. Les produits sélectionnés, dont l’usage était destiné aux bébés et aux enfants, étaient rembourrés et provenaient de détaillants comme Babies R Us, Target, Walmart et Sears, dans 6 états américains. On parle ici de coussins d’allaitement, de matelas pour table à langer et couchette, de sièges d’auto, de sauteuses…  La contamination de l’air et de la poussière constituent donc une source significative d’exposition pour les adultes mais aussi pour les enfants. Ces derniers risquent d’être beaucoup plus exposés étant donné leur plus grand contact main-bouche et avec le plancher.

Comment prévenir l’exposition?

Les fabricants subissent actuellement beaucoup de pression pour le remplacement de ces produits toxiques par des alternatives plus sécuritaires. Par exemple, la compagnie Orbit Baby, fabriquant des lits pour bébé, des poussettes et des sièges d’auto, rapporte rencontrer les normes d’inflammabilité sans l’utilisation de ses additifs chimiques en rembourrant ses produits avec du coton et de la laine. Cependant, en attendant que toutes les compagnies fassent le virage, voici quelques conseils pour diminuer l’exposition :

  • Choisir des matelas et lits fabriqués avec des matériaux, comme la laine, qui sont naturellement ignifuges et rencontrent les normes d’inflammabilité sans ajout de produits chimiques.
  • Ventiler et aérer la maison pour éviter l’accumulation d’ignifugeants dans l’air et la poussière.
  • Régulièrement, utiliser l’aspirateur, un chiffon humide et une moppe pour éviter de remuer la poussière, et de répandre les apprêts ignifuges dans l’air.
  • Limiter la quantité de gras et les autres aliments contenant des quantités élevées de PBDEs. Offrir de plus petites portions de viande, poisson et œufs, tout en augmentant celles de fruits et légumes.
  • Choisir des méthodes de cuisson qui enlèvent l’excès de gras comme bouillir, griller et rôtir.
  • Laver souvent les mains, spécialement celles des jeunes enfants, pour empêcher la poussière de coller à la nourriture ou aux doigts. De plus, les études ont démontré que le lavage des mains réduit la quantité d’apprêts ignifuges qui entrent dans le corps.
  • Privilégier les matériaux naturellement ignifuges comme la laine, le coton, le polyester, le duvet et le cuir.
  • Réparer les meubles brisés afin d’éviter que la mousse de rembourrage soit exposée.
  • Enlever les chaussures à la porte pour éviter que les contaminants vous suivent à l’intérieur.
  • Surtout, ne pas hésiter à poser des questions et à vous informer auprès des compagnie en envoyant un courrier électronique ou en utilisant le numéro 1-800 apparaissant sur l’étiquette

Références :

Santé Canada (2005). Guide des exigences canadiennes en matière d’inflammabilité des futons pour l’industrie, www.hc-sc.ga.ca/cps-spc/alt-formats/hecs-sesc/pdf/pubs/indust/futon/guide-futon-fra.pdf [En ligne], page consultée le 10 août 2013.

Silver, Larry B. (2006). Practice Prevention: PBDEs, Learning and Developmental Disabilities Initiative, www.disabilityandenvironment.org [En ligne], page consultée le 10 août 2013.

Schreder, Erika (2012). Hidden hazards in the nursery, Washington toxics coalition and Safer States, Washington.

Silent Spring Institute, 5 tips to reduce toxic flame retardants at home, www.silentspring.org/flame-retardant-follow-up [En ligne], page consultée le 10 août 2013.

Women’s Voices for the Earth, PBDEs, http://www.womensvoices.org/avoid-toxic-chemicals/pbdes/ [En ligne], page consultée le 10 août 2010.